En 2018, je rencontre virtuellement Gilles, un p’ti gars d’la Yaute, suite à des messages sur C2C pour recherche de partenaires de vol rando. On s’est contacté pour faire du paralpinisme ensemble. Je ne me souviens plus qui a contacté l’autre en premier, mais je me souviens qu’en 2018, entre son planning de ministre, le mien, et celui d’Eole, ben ça l’avait pas fait. 2019 ? euh… vous avez vu 2019, vous ? Où est donc passée cette année ??? y a bien eu quelques beaux vols mais tout est passé si vite… Et nous voilà donc en 2020, fraichement sortis du confinement et la furieuse envie de voler.
Gilles m’envoie un message, et me dit, je suis dispo le week-end du 14 juillet, je viens voir ta Maurienne. Euh ben OK. Avec Gilles, on ne tergiverse pas, on y va ! Et il me dit, j’amène une copine qui vole. Ben si tu veux, c’est pas un club privé ici, plus on est de fous plus on rit. Valérie, la-dite parapote, s’avèrera être un sacré boute-en-train qui t’anime une rando comme jamais. Toujours prête à rire, curieuse et intéressée par tout, on ne s’ennuiera pas !!! entre elle et l'enthousiasme de Gilles, ça promet!
Le samedi de ce long week-end de quatre jours, madame météo nous fait encore quelques caprices et les hauts savoyards n’arrivent que le soir. On va donc se rencontrer pour la première fois. Y a intérêt que ça matche. Quand je les rejoins ce soir-là pour définir le plan de bataille, ils sont survoltés. Ils échafaudent des plans dans tous les sens. Ils ont plein d'envies, y a plus qu'à y aller.
On avait tous de fortes envies d’Albaron mais le vent en altitude est un peu trop marqué. Au final, ça me va bien. Commencer par un sommet alpi alors qu’on ne se connait que par téléphones interposés, ça ne me paraissait pas être le bon choix. On se rabat sur des sommets plus modestes mais qui n’empêcheront pas de belles bambées. La Haute-Maurienne, c’est raide !
Les photos postées ici sont pour pour beaucoup celles de Gilles qui mitraille tout en avançant avec ses grandes cannes et un peu des miennes quand je me dis que je ne peux pas laisser passer toute cette beauté sans la partager. Peut-être également une ou deux de Valérie qui clique plus vite que le chamois!
JOUR 1 : POINTE DE TIERCEIls ont pas envie de marioller (qui vient bien sûr de « faire le mariolle ») dans le thermique de 10h. Moi non plus d’ailleurs. Et donc si on ne veut pas courir dans la montée, profiter du paysage en haut et voler tranquille avant que la brise de vallée ne s’installe (vers 11-11h30, parfois plus tard suivant les jours et les lieux), le rétroplanning nous amène à un départ en voiture de Villarodin-Bourget à 5h du mat’. Ça pique un peu mais ce n’est pas dû aux rayons du soleil qui lui est encore dans les bras de morphée (bon même si ça ne dort pas un soleil, c’est pour l’image).
Arrivée à Bessans avec les premières lueurs du jour. Les prés à côté du foyer de ski de fond sont fauchés et ça tombe bien, on posera là. Les agriculteurs dans le coin sont tatillons et on a pas envie d’être mal reçus. Nous avons environ 1300m de dénivelé devant nous. Pas mal pour une première journée. Mais la pente est raide sans trop de détours et nous arrivons au sommet en 2h30. Le chemin est bien tracé, pas d’égarement possible. La première partie s’effectue dans la forêt. Nous montons en face ouest et sommes donc encore à l’ombre à ce moment de la journée. Le chemin est jalonné d’oratoires ce qui nous permet de prier Saint Eole pour espérer voler depuis le sommet.
Le soleil se lève progressivement dévoilant les sommets si connus et d’autres que je ne vois pas souvent et dont le nom m’échappe. La vallée se dévoile progressivement et permet d’apprécier le dénivelé réalisé.
Nous quittons la forêt au profit de grandes pentes herbeuses qui se prêteraient bien à des décollages sauvages. Mais nous n’allons pas nous arrêter en si bon chemin et continuons en direction du sommet. Au passage, nous profitons de dame nature qui nous gâte avec de magnifiques fleurs et des habitants farouches que nous avons surpris dans leur petit déjeuner. Rien que pour ça, ça valait le coup de se lever tôt.
Nous entrons ensuite dans la partie plus minérale de la rando. Fini les herbes hautes qui nous chatouillent les jambes. Le chemin reste très agréable. Petit passage « technique » muni d’une chaine toute neuve et nous sommes alors presque au sommet.
Ici à 2973m, le panorama est géant ! Les glaciers de la Haute-Maurienne nous tendent les bras et c’est dans ce décor que nous allons nous élancer.
Au sommet, il y a la chapelle de Tierce, qu’on se demande même comment ils ont fait pour monter tout le matos de construction. Parce que nous, rien qu’avec un parapente sur le dos, c’était pas une mince affaire, alors avec un tas de caillasse… Petit remerciement à Eole car les conditions sont excellentes là-haut et promettent un joli vol.
Après avoir cherché le meilleur endroit pour décoller, nous déplions les voiles à côté de l’oratoire. Il y a de la place pour tout le monde. Des randonneurs commencent à arriver et nous regardent avec curiosité.
J’ai pris soin de « nettoyer » un peu le décollage des cailloux tranchants. Petite appréhension avant de décoller. Ça fait bien longtemps que je n’ai pas volé avec la SKIN, la dernière fois, c’était au Grand Paradis, il y a plus d’un an. Mais nous y voilà. On a dit qu’on y allait à la queue leuleu et je suis en deuxième position. Valérie décolle. C’est mon tour et la bouffe se maintient en léger travers. Dix secondes après le premier décollage, je m’envole à mon tour, suivie dix secondes plus tard de Gilles. En moins de 30 secondes, nous sommes tous en l’air !
Je sors l’appareil photo que j’avais accroché à ma sellette et je commence à mitrailler. La pointe Charbonnel est superbe. Parait que ça décolle de là-haut. Mais parait que c’est engagé… Mais bon, parait que ça ne sera pas pour cette fois-ci de toutes façons… On se contente donc de l’admirer de loin.
Le vol est d’un calme plat permettant de s’adonner à la contemplation. Le ciel pour nous trois c’est trop de luxe ! Je surveille du coin de l’œil la lombarde et son nuage caractéristique qui descend du Mont Cenis. S’il faut parfois s’en méfier, elle permet de faire quelques photos sympas.
En moins d’un quart d’heure, nous voilà posés à Bessans, juste à l’heure pour le café-croissants. Et oui, il n’est pas encore 10h ! On a tous la banane et on espère des conditions similaires pour les deux jours à venir.
JOUR 2 : OUILLE DU MIDIIls ont insisté pour y aller... La météo ne me parait pas idéale pour voler mais selon le vieil adage « qui regarde trop la météo, passe sa vie au bistrot ». Et comme je l’ai déjà dit, avec Gilles, on ne tergiverse pas, on y va et on verra ! J’aime ça ! Donc c’est parti pour une nouvelle bambée de 1300m de dénivelé, au départ de Bonneval-sur-Arc, un charmant village classé de Haute-Maurienne.
La première partie de la montée se déroule sous les télésièges. Ce n’est pas magnifique mais comme le brouillard, nous empêche de voir à plus de 10 mètres, ce n’est pas bien grave.
Bon, dans cette purée, on se plante un peu d’itinéraire. Faut dire que le topo n’était pas hyper explicite. On monte dré dans l’pentu hors sentier. On se trouve divers atterro de secours pour le cas où ça vole mais que la vallée soit encore dans la brume et pouvoir poser un peu plus en altitude. Un charmant pré à vache nous tend les bras et semble être une option tout à fait acceptable. Mais il se fait envahir aussitôt par la brume à son tour…
On finit tout de même par trouver un chemin, une sente qui se perd parfois sous quelques névés. Au sommet, nous refusons le vol avec quelques regrets car l’endroit est superbe. Les brumes montent à une allure folle de tous côtés. La vallée se couvre et se découvre plus vite qu’il ne faut de temps pour le dire. Mais entre deux éclaircies, les sommets se dévoilent et nous pouvons alors admirer l’Albaron, le Mont Séti (il est tellement beau et improbable vu d’ici), la Grande Ciamarella et tant d’autres encore.
Nous redescendons progressivement. A mi-pente, il y a des possibilités de décollage. Cet itinéraire se prête bien à décoller d’un peu partout. Valérie est très motivée car ici, le vent est acceptable mais je l’en dissuade en lui annonçant la force du vent en vallée : 20-30km, et ça ne va pas en s’arrangent... Elle prend son mal en patience et nous suit. Nous retrouvons enfin la voiture, un peu déçus de ne pas avoir volé mais on a fait du repérage !
JOUR 3 : COL DU BARBIERLa météo annonce un peu le même programme que la veille. On décide de ne pas aller trop haut. Je propose donc d’aller au col du barbier, terrain connu pour moi car c’est MA rando du coin quand j'ai pas envie de faire trop de voiture, une belle boucle et de voir des beaux sommets. Malgré la proximité, je n’ai jamais décollé de cet endroit. Car finalement, j’ai plus l’habitude de monter à pied, au déco officiel avec les copains du club.
La rando s’annonce plus modeste que celles des jours précédents avec seulement 800m de dénivelé. On en profite pour se réveille un peu plus tard et à 7h nous sommes à Aussois. Début de la randonnée sous le télésiège (ça devient une habitude) puis très vite on bifurque à gauche pour rejoindre les sentiers sous le plan d’aval.
On arrive très vite au niveau du barrage puis le sentier s’élève parmi les rhododendrons presque en fin de vie. Le sentier monte bien et assez direct. Nous arrivons au col en 1h45 avec moultes pauses pour admirer le paysage et faire les photos.
Il n’est pas encore 9h mais ça ronfle déjà dans la face est du Barbier. Mais ce n’est pas l’endroit idéal pour décoller, le terrain est truffé de myrtillers, d’airelles et de genévriers aux griffes acérées prêtes à te découper les suspentes en menu morceau. On se trouve donc un coin en face sud, également bien alimenté en thermique, même pas besoin de courir! On étale les voiles en limite du parc (de la Vanoise). Il y a de la place à ne plus savoir qu’en faire.
Valérie me dit « c’est ton terrain, tu décolles en preum’s ». Vendu! Je pars donc en premier. La voile monte fort, j’y ai peut-être mis un peu trop d’énergie… Mais une bonne tempo lui rappelle qu’elle doit m’attendre et que ce n’est pas « aile » qui décide !
Tout comme la dernière fois, les décollages s’enchainent et en moins d’une minute nous sommes tous en l’air. Nous contournons la butte du col du barbier. La masse d’air est bien active et avec le gros nuage au-dessus, pas trop envie de faire la maline dans le coin. Nous passons devant les barrages, c’est superbe.
Je re-re-redécouvre ce paysage pour la-nième fois mais sous un angle un peu différent mais avec toujours autant de plaisir et les copains qui ne le connaissent pas sont enchantés. Le bal des décollages commence sur le site officiel ’Aussois et certains monteront à 3000 sans appuyer sur la commande. Une sacrée journée!
De notre côté, l’objectif est ailleurs. Et après un long glide agrémenté de bonnes bulles, nous posons dans le grand champ de ski de fond. Café-croissants ?
BILANPour une première, ces trois jours en Maurienne ont été très concluants. Même si 2020 ne nous permettra pas de réitérer des aventures parapentesques ensemble, il n’est pas dit que je n’aille pas voir du côté de la Yaute comme c’est joli aussi en 2021.... Affaire à suivre...