C'est sûr, la montée du Tacul présente des dangers objectifs, idem la descente au col du Midi même en se tenant sur la trace :
Corinne donne l'échelle du bloc qui a coupé la trace.
La rimaye du Maudit est parfois à vaches, parfois vraiment délicate. Les pentes qui montent à l'épaule ne sont pas toujours évidentes, etc...
Bref nous sommes là en haute montagne et il ne faut pas perdre de vue que ce n'est pas un parquet de salle de danse.
Le couloir du Goûter, à notre époque, est tout en cailloux et on peut cavaler. Dans les années 70, c'était un névé jusqu'au glacier de Bionnassay, on mettait les crampons et on passait en plantant bien le piolet à chaque pas. Il y avait évidemment au centre une goulotte creusée par les pierres, dont le franchissement demandait de l'attention.
A l'époque, c'était déjà un des lieux les plus dangereux des Alpes.
J'ai connu ce couloir avec un câble tendu au-dessus, sur lequel les gens mousquetonnaient une longe pour s'assurer... et un jour un Italien s'arrêta pour remplir sa gourde dans la goulotte, bloquant une collective.
Passa un caillou qui culbuta l'Italien inconscient, qui se retrouva pendu au câble... et la secousse fit déraper les suivants, puis le câble décida que la charge était trop grande et un ancrage se fit la malle.
Bilan : 12 Italiens empilés en vrac au bout du câble, retenus par le bout de ferraille qui avait cédé avec le glacier de Bionnassay 300m au-dessous qui manquait de charme. Bonne aubaine pour le porteur du refuge qui, passant par là, posa sa claie et alla récupérer un par un les 12 Italiens, empochant au passage quelques pourliches.
Salut Michel, si d'aventure tu me lis.
On avait bien ri à la Potinière !
Pour avoir connu le couloir en diverses conditions, je ne crains pas de dire qu'il est moins dangereux à notre époque parce qu'on le traverse plus vite qu'avant.
Les gradins délités qui suivent ne sont pas vraiment dangereux si on ne reste pas sous des sarpés, ni à la montée ni à la descente. En principe on ne met les mains quasiment nulle part.
Il y a une variante qui emprunte un éperon rive gauche, avec des vrais passages d'escalade (facile) mais ce n'est pas à l'abri d'un éventuel ricochet d'un éventuel bloc facétieux qui aurait décidé de quitter le couloir. Pour être à l'abri, il faut vraiment prendre la voie normale, loin du couloir. C'est tellement nettoyé par le passage de dizaines de milliers de personnes que c'est quasiment un GR.
A la descente, personne n'aurait l'idée de s'encorder, sauf à faire descendre un sarpé complètement épuisé ou malade.
A part ça l'Aiguille du Goûter n'a rien d'une aiguille : c'est un tas de caillasses versant St Gervais, un glacier accidenté versant Chamonix et une vilaine pente caillasseuse versant Les Houches, moraine de fond de l'ancien glacier du Bourgeat (fondu) au-dessus de ce qui reste du glacier de Taconnaz.
Ce secteur du massif est extrêmement inhospitalier, même les chamois n'y vont pas et les rares choucas qui se risquent par là restent prudemment assez haut.
Si j'étais géographe, j'appellerais ce sommet secondaire "Tête du Goûter".
J'irai quand même y faire un tour cet automne, histoire de remonter au Mont Blanc et de refaire ce vol magique. J'irai probablement en solo mais si un lecteur est intéressé je l'emmènerai avec plaisir.
J'ai fait la face N de Bionnassay début juillet 1970. Pente modérée, pas trop accidentée cette année-là, neige parfaite. La véritable course c'est l'arête qui descend au col du Dôme : extrêmement fine, sans corniche, de la place pour un seul pied, avec 55/60° à gauche et 50° à droite versant italien. Un gus avait un crampon qui bottait et il y avait de la tension dans l'air... puis ce fut une grosse bavante pour remonter au Dôme du Goûter.
La descente de l'Aiguille tout en crampons n'avait pas été mal, puis la descente du glacier de Tête Rousse en ramasse avait aussi été croquignolette.
Maintenant ce glacier n'existe plus, c'est tout de la caillasse.
Mes montagnes ne sont plus ce qu'elles étaient mais je les aime quand même.
L'itinéraire dit "des Aiguilles Grises" doit être fabuleux en hiver. En été, c'est certainement très bavant mais il n'y a personne et on doit apprécier la sauvagerie des lieux. Descente sur Courmayeur en parapente, évidemment.
Salut et fraternité*