Au niveau de performance où en sont les ailes de cross, les déformations structurales ont maintenant une influence au moins aussi importantes que la porosité dans la dérive du comportement.
Et de comprendre qu'il n'y a aucune raison que cette dérive se fasse de façon linéaire (proportionnelle au temps de vol).
Durant mes dernières années de vol sous des voiles compé, j'avais résolu de ne plus chercher la "petite bête", l'origine de la dissymétrie de comportement quand j'en constatais une (le plus souvent une suspente dans les clous mais pas suffisamment, ou un nœud que j'ai mis quelques vols à découvrir !) : voile tournant légèrement en transition, abattée toujours accentuée du même coté.
Je me contentais de corriger aux stabilo's - point.
Il n'en restait pas moins que les tests en comportement spirale m'avaient montré une très grande sensibilité du calage des plumes et tout particulièrement des avants : 8mm sur la hauteur du cône d'une 30m² suffisait à basculer du "coté obscur des g's".
Aussi étais-je alors déjà convaincu qu'avec les architectures complexes des ailes actuelles réduisant le nombre de suspentes, cette sensibilité serait exacerbée.
Si l'on considère maintenant l'allégement extrême des structures, force est de constater qu'il n'y a plus guère de redondance structurale (ce n'est plus ceinture ET bretelles - c'est ceinture OU bretelle)
Et qu'en conséquence, d'éventuelles surcharges (incidents de vol -on a enregistré jusqu'à 12 g's sous des biplaces, heureusement construits solides- ou lors accrochage de suspentes au sol en cours de montée dans un vent soutenu) vont immanquablement conduire à des déformations irréversibles.
Suivant la zone touchée par ces déformations, le plus souvent internes et invisibles à l’œil, le comportement en sera plus ou moins affecté.
Ce n'était que des postulats jusqu'à ce que je tombe sur le récit des malheurs d'Honorin Hamard lors des derniers mondiaux.
La veille de l'ouverture de la compétition, son aile de course qu'il avait contrôlé au laser ne volait plus droit accélérée, le contraignant à faire la compétition avec son aile de réserve.
Et de témoigner que ce genre de chose arrivait... parfois !
Que retenir de tout cela ?
- Qu'il faut "assumer" lorsque l'on achète de la haute performance light, en particulier en occasion.
- Qu'un vendeur peu scrupuleux (et/ou inconscient de la dérive d'une aile dont il n'exploitait pas la moitié du potentiel) peut se retrancher derrière le rapport de contrôle d'un labo; labo qui n'a le plus souvent ni le temps (les prix...) ni parfois la compétence pour faire un recalage topologique ou même un essai en vol au régimes de vol où les dérives de comportement peuvent apparaître.
Car il est aussi ma conviction que tous les constructeurs n'ont pas le recul et le retour d'expérience nécessaire à la maîtrise de la mise en œuvre des matériaux légers, tels que Alexandre Paux ou Xavier Demoury ont pu la développer.
Cela va nécessiter du temps pour que les chercheurs trouvent ce qui marche, et que les autres... copient ce qui marche
Et de ne pas m'étonner que des Air Cross aient affiché en leur temps des volumes impressionnants d'heures de vol - Regardez à l'intérieur si vous en croisez une bien fanée : c'est de la charpente, pas de la dentelle !
Après, c'est plus lourd, c'est sûr
Alors, c'est vous qui vous voyez, surtout vous qui êtes tenté par de la "perfo pas chère"
Vous pourriez vous retrouver sous un... OVNI !