A la demande générale... euh... non ?
Les ZEN sont issue d'une recherche très différente de celle qui avait conduit aux très tolérantes ASTRA, SUPRA & XTRA
Leur profil est très différent : c'est un biconvexe asymétrique avec un bord d'attaque en... gueule de squale
Avec la Zen, APCO tentait d'entrer de plein pied dans la course à l'armement
De plein pied... mais à reculons, comme si l'on avait forcé la main à Anatoly
En témoigne la taille des suspentes dont elles étaient équipées à la livraison : avec 2.5 mm en partie basse, elles ne dépareraient pas aujourd'hui sur un biplace !
Avantage : on pouvait faire des nœuds dedans, ce qui allait être utile comme on va le voir
C'était fini de rigoler et de faire des photos en lâchant les deux mains : c'était ambiance compé - Point -
Mais surtout, dès les premiers vols, un malaise s'installait rapidement à bord : "z'on oublié le virage ou quoi?"
Et puis en thermique, une impression confuse d'échapper à la masse d'air, l'aile semblant chercher sa respiration...
Non, c'était pas vraiment la joie... Et c'était dommag
Car une fois le barreau poussé et/ou les trims relâchés, on sentait bien qu'il y avait des chevaux sous le capot, mais bridés, étouffés : fallait juste changer les échappements et la direction
On allait s'y atteler... C'était juste une question de temps
Mais de temps, le marché du parapente de la fin des années furieuses n'en avait pas
Alors, quand un charismatique jeune pilote de Midi-Pyrénées, leader d'un team de joyeux mousquetaires (trois mais ils étaient eux aussi quatre, un PARATECH-addict s'étant mêlé au trio), acquis à la cause d'APCO et soutenus par un équipementier de sport français... dé-suspente... chute... ouvre son parachute... dont les ancrages lâchent à leur tour sous le choc de l’ouverture en chute libre...
C'en est fini des Zen françaises, même si sous d'autres latitudes, leurs soeurs jumelles récoltaient quelques lauriers au plus glorieux, elles finiront en décor de plafond de salle des fêtes (pas très prudent ça... nylon<-> feu /!\ ) le temps d'un anniversaire ou neuves à la décharge
Toutes... Toutes ? ... Non !
Voici l'histoire de quatre d’entres elles
Et on va commencer par la fin de leur traversée du désert - Je plante le décor : Saint Hilaire du Touvet -
Il est à peine neuf heures dans la fraicheur humide d'une matinée de fin septembre.
Je viens de quitter le sol et il me semble maintenant glisser sur des rails bien huilés. Je suis pilote confirmé, sous une aile de compétition quasi neuve, avec zéro turbulence et un parachute révisé de frais; les quelques autres voiles en l’air sont distantes de plusieurs centaines de mètres.
Et pourtant, je ne suis pas dans mon vol: je n'arrête pas de fixer les falaises que je longe : un nœud dans l’estomac et le sentiment que ses arêtes de pierre peuvent à tout instant me saisir !
Je ne risque pourtant rien, absolument rien... Tout va bien... Je m’encourage : "Relaxe-toi donc, espèce d’imbécile!"
Un coup d’œil au dessus : ma voile est belle au dessus de moi... Pas un bruit.
Mais soudain, elle décroche : un drapeau violet avec des éclats roses dégringole soudain devant moi... Elle se ré-ouvre... Puis tout son bord d'attaque s'effondre... Elle se redresse... une secousse, une pause, puis tout se déchaine à nouveau : des fermetures de plus en plus amples, ressources, abattées…
Je suis hagard, pétrifié. Je ne sais pas quoi faire. Je ne sais même plus si je vole encore....
Une autorotation, 360... Déjà le sol qui arrive à sa rencontre… posée, elle s’affaisse et tombe au sol au sol.
Je regarde sa sœur jumelle: elle semble toujours me porter, fidèle, sans manifester aucune velléité à m'embarquer dans la même sarabande infernale. Elle glisse toujours sur ses rails. Une longue droite dans la plaine, un virage à droite, long plané, nouvelle droite, étape de base, droite, finale, ressource : je suis posé au milieu l'atterrissage de Lumbin… Mes jambes me portent… c’est presque une surprise !
En boule dans l'herbe humide, ma voile et ma sellette sont là, abandonnées... Le pilote à disparu.
Un voleur ? Non. Le revoilà d’ailleurs en train de discuter : un pote à lui, juste au bord du terrain. Il me voit, marche un peu dans ma direction avant d'être à nouveau interpelé par quelqu’un que je ne reconnais toujours pas: il le salut gentiment, quelques mots en anglais, prend congé et se dirige à nouveau dans ma direction, souriant, heureux de ce petit intermède avant un petit déjeuner consistant.
Lui c'est Alex Louwe, chef pilote d’une firme israélienne et moi... je me demande bien ce que je fous là, au lieu d'être dans mon lit ce samedi matin, en plein milieu de la Coupe ICARE !
En fait je le sais très bien : je suis là parce que je suis vivant… et que c’est même étonnant.
Mais… « Play Again » m’a dit deux fois la vie. J’ai eu cette chance, d’autres non.
Profiter alors… Respecter, voler, vivre et l’ aimer. Puis mourir, car il le faut bien… mais vraiment le plus tard possible !
Flash back… Deux ans déjà que Yann ESPINASSE nous a quitté...